~ Premier contact épistolaire ~ [ TERMINE ]

Les deux mains appuyées sur une table de marbre gris, penchée vers la carte déployée sur celle-ci, la descendante du trône de Nidia-Il s’instruit pour son nouveau rôle. Voici deux jours qu’elle intègre totalement ses fonctions, jeune impératrice, elle se considère encore sous le couvert de son maître d’histoire, d’art et d’escrime, Locario. Cet excellent astrologue de soixante ans à la forme physique impressionnante désigne du doigt chaque continent présent sur la carte étalée devant eux. D’une voix douce mais certaine, il explique pendant des heures les noms et origines de chaque continent à la jeune femme.

- Et donc le continent de Nidia …
- Ainariël ! ?

Les deux protagonistes se retournèrent, à quelques mètres d’eux se tenait Ewinn une jeune femme venant d’un peuple vert et cousine au troisième degré de la jeune l’Impératrice. Soulevant ses mains de la table fraîche, la demi-sylvaine s’avança bras tendus vers le membre de sa famille mais baissa bien vite ceux-ci sous le regard de son précepteur. Ewinn déçue elle aussi de se voir refouler de la sorte s’inclina bassement devant Ainariël qui fusilla Locario du regard. Enfin, la jeune femme que l’Impératrice dominait d’une bonne tête se redressa et désigna du doigt les escaliers dorés du fond de la sale.

- Une lettre cachetée du royaume de Hara vient d’arriver pour toi dans la salle du trône.

La gratifiant d’un léger signe de tête Ainariël quitta la pièce, sa légère coiffe en plume d’on ne sait quoi voletant derrière sa chevelure d’ébène. Foulant rapidement le sol de cristal de son palais hérité de son ancêtre de prophétie et non de sang, avec un léger frottement de ses bottes de cuir souple foulant la surface lisse et miroitante, son précepteur la regarda perplexe, ouvrir la grande porte de noyer blanc et sortir en la refermant derrière elle avec la précaution d’éviter un claquement désagréable. Alors que la jeune femme descendait quatre à quatre les escaliers de marbre blanc, elle ne fut pas surprise de sentir son cœur battre la chamade. Jamais encore elle n’avait reçue de lettre officielle, et ce fut la peur au ventre qu’elle pénétra par une porte dérobée dans la salle du trône. La refermant avec un petit cliquetis significatif, elle se glissa dans la grande salle avec une souplesse féline et un silence naturel.

Sur l’accoudoir du siège Impérial, un plateau argenté contenait une enveloppe blanchâtre légèrement salie pendant son voyage entre différentes mains. La saisissant entre ses doigts tremblants, Ainariël se posa tranquillement sur son trône dominant l’immense sale de réception vide aujourd’hui. En face d’elle, une grande allée au sol de cristal opaque et aux rangées de colonnes blanches la bordant s’étendait sur cinquante mètres avant de se terminer par un grand mur aux portraits de famille et à la grande porte d’acajou massif. Tournant l’enveloppe entre ses mains, elle décacheta celle-ci d’une traction du pouce sur le sceau de cire rouge. Sortant une feuille blanche pliée en trois, elle laissa choir l’enveloppe vide sur le plateau et déplia soigneusement le pamphlet. Une belle écriture masculine vint alors miroiter sous ses yeux. A part les situations géographiques et une bref histoire des peuples de chaque continent, la jeune femme ignorait totalement la nature de chacun de leur dirigeants. Aussi ce fut pour elle une réponse à l’une des nombreuses questions qu’elle se posait les concernant.

Lettre cachetée de Loki a écrit:: Salutations, Impératrice,

Je suis Loki, actuel monarque Haren. Le peuple de Hara a depuis quelques années fondé sa propre civilisation sur le continent renommé Hara depuis, comme vous devez déjà le savoir. Nous sommes donc particulièrement en retard techniques par rapport aux autres nations de Mistyan. Cela dit, ce retard est légèrement comblé par le riche continent que nous ont cédé les Agans. Notre principal moyen de survie efficace est depuis lors basé sur une entente importante envers les autres continents. Etant sous la protection directe des Agans, vous pouvez vous douter que nous n'avons donc pas trop de soucis à se faire pour la sureté de notre territoire et pouvont donc focaliser toute notre attention sur le développement économique et la prospérité de Hara. Pour cela, j'ai entrepris de contacter tous les échevins du monde. J'ai abouti rapidement à un accord commercial avec Baronia, que je crois savoir en bons termes avec vous.
Le Peuple de Nidia-Il est le second à recevoir mes paroles, je suis vraiment très occupé en ce moment à régler les problèmes internes que rencontre mon peuple et j'aurais aimer vous gratifier de ma présence plutôt que d'une simple lettre, mais mes obligations actuelles m'en empêche à mon plus grand regret.
Je pense sincèrement que les Harens et le peuple de Nidia-Il auraient en avantage d'aboutir à un accord commun d'alliance permanente. Nos deux nations sont assez faibles en comparaison des autres puissances qui peuplent le monde.
Je propose donc à vous et à votre peuple de former avec le peuple Haren, cette alliance totale, afin de faire profiter nos deux nations de tous les avantages que ça pourrait induire.
Cependant, conclure une telle alliance simplement par courrier interposé n'est pas très...glorifiant de ma part, c'est pourquoi je préférerai qu'on s'occupe, si vous êtes d'accord sur le principe, de cette alliance de vive voix.
N'ayant le luxe de pouvoir me déplacer pour l'instant, je me permet de vous inviter dans mon humble capitale qu'est Wenta.

J'espère recevoir de votre part une réponse favorable.

Monarque et Seigneur de Guerre Haren, Loki

Le cœur battant contre la parois caverneuse de sa poitrine, la jeune Impératrice replia soigneusement le pamphlet et le remit dans son enveloppe. Etonnée d’avoir pu lire et comprendre la lettre provenant d’un Haren, puisqu’ils ne parlent pas la même langue, Elle se leva, ouvrit une nouvelle fois la porte dérobée et s’y glissa tranquillement. Remontant les escaliers de marbre jusqu’au premier palier, elle prit cette fois à gauche et avala une dizaine de marches pour arriver dans un bureau de gestion des comptes. Une fois de plus, elle s’était trompée de pièce, mais peu importait car elle était vide de tout être vivant. Fermant la porte à double tour, Ainariël ouvrit les épais rideaux de lin et s’assit sur la chaise basse. Rapidement, elle sortit d’une boîte d’acajou une feuille parfumée à la rose, une plume à écrire et un pot d’encre noire, disposa le tout devant elle, respira à fond en attrapant la plume et la trempant dans l’encre, puis se pencha tranquillement sur le papier, écrivant avec soin et lisibilité.

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A Loki Monarque Haren
Wenta Hara.

Monseigneur Loki,

Je ne puis m’empêcher malgré ma récente prise de fonction, d’être touchée par le manque de moyens financiers de votre continent. Cependant il est important que vous sachiez l’aide que j’aurai aimé vous apporter si les possibilités m’en étaient données, ce qui n’est malheureusement pas le cas, mais je me promet comme à vous même d’y remédier rapidement. En effet Nidia-Il est en bons termes avec Baronia mais aucune rencontre directe entre les deux nations n’est encore programmée. Je ne vais pas sans savoir les dangers qui guettent nos civilisations, et vous remercie pour votre invitation qui me semble sans aucun doute profitable pour nos deux royaumes. Aussi je vous fait part de la nouvelle suivante, je serai à Hara dans quatre jours au coucher du soleil pour une durée indéterminée. Je prendrai moi même mes dispositions pour ce voyage et vous serai gré de taire à votre royaume notre rencontre tant que l’entente n’est pas signée. Pardonnez ma froidure mais Nidia-Il a connu tant de souffrances que je me sens obligée de protéger ma nation par mes rapports personnels. A bientôt.

Impératrice Ainariël
Thiers Nidia-Il.

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Cachetant sa lettre à la cire rouge en y ajoutant un fin ruban jaune, la jeune femme referma les rideaux obscurcissant la pièce et sortit de celle-ci le pamphlet en main. Dévalant l’escalier et traversant à grand pas les salles de son immense palais sous les regards hébétés de ses courtisants, la jeune femme finit par demander aux gardes de lever la herse principale afin de sortir quelques minutes de son enceinte. Juchée sur son cheval à la robe brune et au crin noir, et encapuchonnée afin qu’on ne puisse reconnaître ses traits, Ainariël traversa la moitié de la ville jusqu’à arriver sur la place centrale du village. Elle s’arrêta devant un jeune mendiant qui semblait en pleine santé.

- Veux-tu gagner dix Nirils ?

Le jeune homme acquiesça. L’Impératrice se pencha et souleva sa capuche sombre, l’homme écarquilla les yeux.

- Alors porte cette lettre au port et donne la au bateau postal en recommandé, puis viens me voir au palais.

Souriant avec gratitude, il attrapa la lettre et partit en courant vers la sortie de la montagne. La jeune femme regagna ses quartiers sans faire de vagues dans la ville pour commencer à préparer ses malles.